A propos

AfricaVet est le portail de la medecine vétérinaire en Afrique. Créer en 2010 pour …

Contactez-nous

 

Phone

+221 000 000 000

 

Address

Dakar, ……,
Yaoundé, Biyem-assi

Sécheresses et inondations : 10 millions de têtes perdues en Afrique de l’Est, l’alerte qui relance le débat sur la résilience de l’élevage

Entre 2020 et 2022, les sécheresses et les inondations auraient entraîné la perte d’environ 10 millions de têtes de bétail en Afrique de l’Est, pour une valeur estimée à 2 milliards de dollars. Cette alerte a été portée à Nairobi par un climatologue impliqué dans les initiatives de services climatiques de l’IGAD/ICPAC, lors d’un atelier réunissant acteurs du climat et journalistes. Le message est sans ambiguïté : face à l’intensification des extrêmes, l’information climatique “utile” et accessible aux éleveurs devient un intrant stratégique, au même titre que l’eau, l’aliment et la santé animale.

Une facture économique et sociale massive pour les ménages pastoraux

Selon l’article du Tanzania Daily News, le chiffre de 10 millions de têtes perdues sur la période 2020–2022 correspond à des chocs combinés (sécheresses et crues) ayant fortement dégradé les moyens d’existence des ménages dépendants de l’élevage. L’intervention mentionnée met aussi l’accent sur une réalité opérationnelle : les catastrophes se succèdent plus vite que la capacité de reconstitution des troupeaux.

Au-delà de cette estimation, plusieurs signaux convergents confirment l’ampleur de la crise climatique dans le bassin est-africain et le Grand Horn : en 2022, l’Organisation météorologique mondiale (OMM/WMO) rapportait déjà des pertes de bétail se chiffrant en millions (notamment en Kenya et en Éthiopie), et soulignait une mortalité très élevée dans certaines zones somaliennes.
Dans une autre communication, l’OMM indiquait que des millions de têtes avaient déjà péri dans le contexte de la sécheresse démarrée en 2020, rendant la reconstitution des troupeaux longue et incertaine.

Quand la météo devient une variable de production

Dans les systèmes pastoraux et agro-pastoraux, la pluie et les températures déterminent directement :

  • la disponibilité des pâturages (quantité/qualité) ;
  • l’accès aux points d’eau ;
  • les mouvements de troupeaux et les concentrations animales ;
  • la pression sanitaire (stress, maladies, parasitisme, risques vectoriels après pluies intenses).

C’est précisément l’enjeu soulevé à Nairobi : les extrêmes climatiques ne sont plus des “événements”, mais une contrainte structurelle, qui redessine les calendriers de production, la productivité laitière, les performances de reproduction, et la stabilité des marchés (baisse d’offre, volatilité des prix, ventes de détresse).

“Dernier kilomètre” : le chaînon faible de l’adaptation

Le point central du témoignage relayé par Daily News est moins le chiffre (10 millions) que la solution proposée : rendre l’information climatique exploitable et accessible aux communautés, notamment via la médiation des médias, des services météorologiques et des secteurs dits “climato-sensibles” (agriculture, eau, énergie, etc.).

Sur ce volet, l’IGAD Climate Prediction and Applications Centre (ICPAC) explicite sa stratégie : améliorer la diffusion des informations climatiques et des alertes précoces en Afrique de l’Est, et renforcer les capacités des services météo, des journalistes et d’organisations relais pour atteindre les utilisateurs finaux.

Ce que cela implique, concrètement, pour la production animale

Pour les filières d’élevage, l’adaptation ne peut plus se limiter à “répondre après la crise”. Elle doit se structurer autour d’un paquet de résilience, combinant production, santé animale et gestion des risques :

  1. Institutionnaliser l’alerte précoce au niveau local
    Traduire les prévisions saisonnières et les alertes (sécheresse, crues) en consignes pratiques : plan de transhumance, sécurisation de l’eau, priorisation des animaux (noyau reproducteur), achats d’aliments, ventes anticipées.
  2. Sécuriser l’eau et l’aliment comme infrastructures critiques
    Réhabiliter/équiper des points d’eau, développer des solutions de stockage et de distribution, structurer des “banques fourragères” et des stocks stratégiques (fourrages conservés, sous-produits).
  3. Renforcer la prévention sanitaire en période de stress
    En période de sécheresse, la baisse d’état corporel augmente la sensibilité aux maladies ; après les pluies et inondations, la dynamique vectorielle et la promiscuité peuvent s’aggraver. Les plans de prévention doivent être saisonnalisés et articulés aux alertes climatiques.
  4. Déployer des mécanismes financiers de réduction des pertes
    Promouvoir des instruments adaptés : assurance indexée (pluie/pâturage), fonds d’urgence, crédit de reconstitution, incitations pour la vente anticipée (destocking) afin d’éviter l’effondrement total des actifs.
  5. Faire des médias et des relais communautaires des partenaires techniques
    Le message de Nairobi insiste sur la valeur des partenariats : médias + services météo + secteurs techniques. Dans l’élevage, cela suppose de former les relais (y compris radios rurales) pour délivrer une information compréhensible et actionnable, au bon moment, aux “derniers utilisateurs”.

Enjeux pour les décideurs : de la crise récurrente à la politique de résilience

La séquence 2020–2022 (et ses prolongements) met en évidence un besoin de gouvernance : lier politiques d’élevage, systèmes d’alerte précoce, protection sociale et services vétérinaires dans un même dispositif. L’OMM rappelle d’ailleurs l’importance de l’action anticipatoire et du renforcement des services climatiques pour protéger vies et moyens d’existence.

About Author

Flora J. Ingah