
Le cabinet SPHINGE, de concert avec ses partenaires (MINEPIA, CDPM, SPHIHT…) a organisé un atelier de renforcement des capacités des chefs de cuisine le 25 juin dernier à Douala. Thème retenu : « Patrimoine halieutique du Cameroun : créer et diffuser les cartes Poisson 237 au sein des hôtels et des restaurants ». L’activité a été organisée dans un contexte où les cartes présentées actuellement ont très peu d’ancrage territorial, ce qui est embarrassant pour les consommateurs qui souhaitent retrouver les goûts et saveurs de leur pays, de même que les touristes qui souhaitent explorer les trésors de notre patrimoine gastronomique. Le chef Vincent Doumbe qui a démarré sa carrière en 1978 estime qu’il y a un grand travail à faire en ce moment pour donner plus de visibilité aux mets camerounais.
« C’est assez révoltant de constater que dans nos cartes de restaurants et d’hôtels, c’est toujours les mêmes choses. Il n’y a pas de variétés locales, ni de créativité ou d’innovation. C’est vrai qu’on va parler de mets traditionnels, mais la cuisine est un art qui convoque la créativité. La génération actuelle de professionnels doit tenir compte de cela », confie-t-il. Tout en regrattant le « copier-coller » observé au niveau des mets proposés aux consommateurs à l’heure actuelle, son jeune collègue, chef Guy Nzogue Dibondo, consultant hôtelier par ailleurs persil d’or 2023 abonde dans le même sens quand il avoue que ce sont les mêmes choses qui sont proposés dans le segment poisson, à savoir : les soles, les crabes, les bars, etc.
Toutes choses qui ne contribuent pas à révéler la diversité culinaire du pays. Il s’est prêté à l’exercice en 2021 et a fait six mois sans rentrées. « On ne trouve pas suffisamment des produits halieutiques locaux dans les offres. Ce qui est un réel problème, tant le gouvernement est engagé dans la mise en œuvre de la politique d’import-substitution qui vise à importer moins ce que nous consommons et encourager ce que nous produisons localement », ajoute le Dr. Victor Viban, délégué régional des Pêches et des Industries animales du Littoral.
La promotion de l’import-substitution en ligne de mire
Face à un tel tableau peu reluisant, le cabinet SPHINGE estime qu’il est souhaitable d’encourager les patrons de structures hôtelières et des restaurants à diffuser au sein de leurs établissements, une carte dédiée au patrimoine halieutique local, pour capturer cette demande et asseoir une identité culturelle décisive pour le choix des consommateurs locaux et étrangers. « C’est important d’engager cette dynamique pour donner corps à l’import-substitution. Nous devons avoir sur nos tables et nos assiettes des produits halieutiques locaux. Ils sont produits dans nos restaurants à travers les cartes qui permettent de poser un choix de consommation. Il est question que sur ces cartes désormais, la grande place soit accordée aux produits locaux », précise Mme Metchum Tayou, déléguée générale de NdemaLaSue.
La rencontre de Douala avait donc pour ambition d’outiller une trentaine de chefs de cuisine en matière de catalogue des ressources halieutiques naturelles, de techniques culinaires, de savoir-faire traditionnels, pour relever l’attractivité des cartes retrouvées dans les hôtels, plutôt que de noyer le poisson dans les différentes offres de mets. Le but ultime est d’associer le secteur hôtelier à la mise en œuvre de la politique d’import-substitution dans la filière poisson, à l’introduction d’une carte « Poisson 237 » auprès de 50% d’hôtels (5 à 3 hôtels) et restaurants (5 à 3 fourchettes) camerounais de Douala, Kribi et Edéa, à l’horizon 2025 avec une projection vers d’autres villes de la sous-région. « Cela demande de la diversification. Quand vous êtes au sein d’une carte commune ou partagée, on peut se satisfaire de trois menus. Mais, lorsqu’on parle de carte sur un format A5 recto-verso, il en faut 10, 12 voire 20. Ça demande beaucoup de créativité, d’être sûr de trouver les produits, d’explorer tout le catalogue de ce qu’on a, d’explorer les techniques culinaires. On ne peut pas tout servir par exemple en braisé ou en bouillon », souligne Mecthum Tayou.
Les pouvoirs publics en mode « veille permanente »
La CDPM est d’avis qu’il faille vulgariser davantage le catalogue des espèces marines disponibles au Cameroun, en tenant compte de leur saisonnalité. Son secrétaire exécutif reconnaît que beaucoup est déjà fait au niveau des pouvoirs publics pour mieux encadrer les acteurs de la filière poisson. Il en veut pour preuve le débarcadère de Youpwe qui a coûté plus de six milliards de F et est le fruit d’un don du Japon. Dans la foulée, le délégué régional Dr. Victor Viban mentionne les infrastructures développées comme le débarcadère de Mboa Manga à Kribi. Avant de chuter sur une bonne note, avec un projet en cours dédié au développement de l’entrepreneuriat aquacole. Le dossier est rendu à la phase de recrutement du personnel, pour augmenter la production locale du poisson et atteindre, d’ici 2030, une production de 25 000 tonnes de poisson.
Source : GABON1, 2024